L’élection présidentielle péruvienne du 6 juin dernier s’est jouée à un cheveu. Avec 50,12 % des suffrages, l’instituteur andin Pedro Castillo ne devance que de 40 000 voix sa rivale Keiko Fujimori.

Ce qui a constitué un tremblement de terre au Pérou tarde aujourd’hui à se concrétiser. La fille du très droitier Alberto Fujimori, condamné à 25 ans de prison pour corruption et crimes contre l’Humanité, conteste aujourd’hui les résultats des urnes. Qu’importe si cette admiratrice de Donald Trump est incapable d’apporter le moindre élément de preuve aux allégations de fraude qu’elle dénonce : le tribunal électoral n’a toujours pas proclamé les résultats à l’heure où nous écrivons, soit 25 jours après le scrutin. Même la très washingtonienne Organisation des États américains (OEA) dont le rôle dans la contestation des élections remportées par Evo Morales en Bolivie en 2019 avait été prépondérant, n’a rien trouvé à redire sur les élections péruviennes.

Pedro Castillo est un instituteur originaire de la région rurale de Cajamarca, isolée des centres de pouvoir, située sur la côte pacifique. Ce syndicaliste avait accédé à une notoriété nationale en 2017 en menant une grève des enseignants. Il a été investi candidat à l’élection présidentielle par Perù libre, parti marxiste-léniniste sans en être lui-même adhérent. Il a fait campagne sur les thèmes de l’éducation et de la réforme constitutionnelle.

Dans ce pays parmi les plus inégalitaires du continent, Pedro Castillo aura pour tâche de réduire les inégalités de développement héritées de la colonisation espagnole entre les régions andines et la côte. Il n’aura pas la tâche facile, le parlement de Lima penchant majoritairement à droite.

Si son élection n’est pas encore confirmée, ses partisans, majoritairement issus des zones rurales défilent régulièrement à Lima et dans les grandes villes du pays pour défendre leur vote. Mais dans un continent américain où les antagonismes de classe n’ont jamais été aussi forts, la bourgeoisie est prête à opter pour l’option fasciste pour défendre ses positions : après le Brésil, la Bolivie, le Venezuela et les États-Unis, voici au tour du Pérou de faire face à des menaces putschistes.