Pour obtenir la neutralité des socialistes et maintenir son gouvernement, François Bayrou avait choisi de renvoyer à des discussions entre les syndicats de patrons et de salariés l’avenir de la réforme des retraites de 2023. Ces discussions semblent déplacées alors que les équilibres géopolitiques hérités de la guerre froide sont en train de vaciller. Il est peu probable que ce «conclave» aboutisse à autre chose qu’à l’évitement d’une censure précoce du gouvernement Bayrou.
Le gouvernement actuel n’est pas vraiment en mesure de revenir sur la réforme de 2023 (qui porterait l’âge de départ à 64 ans). Il compte parmi ses membres Élisabeth Borne, la Première ministre qui l’avait défendue. Il ne peut se passer du soutien des troupes d’Édouard Philippe, Premier ministre qui avait défendu une première mouture de la réforme emportée par la pandémie mondiale. Au petit jeu des calculs parlementaires, on imagine mal les députés LR soutenir un renforcement du système par répartition.
Enfin, le Premier ministre lui-même a posé un cadre condamnant la discussion à la stérilité. D’abord, la réforme de 2023 n’est pas suspendue, le statu quo profite donc directement au patronat. Ensuite, le gouvernement fait le choix de retenir des hypothèses plus pessimistes que le Conseil d’orientation des retraites et la Cour des comptes, exigeant des économies immédiates qui ne sont pas nécessaires et ne proposant rien pour résoudre les problèmes de financement de long terme.
Profitant du climat belliciste ambiant, le patronat et le gouvernement tentent même de faire passer l’idée que l’allongement de la durée de travail permettrait de faire reculer vers l’est la ligne de front ukrainienne.
Le résultat est pour l’instant un échec flagrant. FO a choisi de mettre en scène son départ du conclave dès le début. La CGT vient également de quitter la table. La CFDT fait les gros yeux. Le Parti socialiste hurle à la trahison de la parole donnée. La FI hurle à la trahison du PS. On peut imaginer que le patronat hurle de rire.
L’accord de non censure du gouvernement Bayrou ne s’avère pas payant pour le PS. Pire pour lui, sa méthode d’une prétendue démocratie sociale apaisée se montre une nouvelle fois être un artifice au service de la régression sociale.