En novembre 1972 s’est tenu à Bobigny un procès au retentissement immense, un de ces événements qui transforment le cours de l’histoire. Marie-Claire Chevalier, une jeune fille ayant avorté à la suite d’un viol se retrouve inculpée, ainsi que sa mère, deux collègues de sa mère « complices » et la femme ayant opéré. L’avortement est alors puni par une loi datant de 1920 et le dénonciateur n’est autre que le violeur lui-même. Défendues par l’avocate Gisèle Halimi qui, avec l’accord des prévenues, va pleinement mettre en lumière toutes les étapes du procès, les plaidoiries vont transformer la défense en une véritable mise en accusation de la loi - « Monsieur le juge, je ne suis pas coupable ! C’est votre loi qui est coupable ! » dira la mère.
Ce procès fera progresser d’un bond la lutte en faveur de la dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse, dépénalisation finalement obtenue à l’Assemblée nationale grâce à la force de conviction de Simone Veil, le 17 janvier 1975.
Avec beaucoup de talent, Marie Bardiaux-Vaïente pour le scénario et Carole Maurel pour l’illustration ont fait de l’histoire de Marie-Claire et des autres inculpées, de Gisèle Halimi et de toutes les militantes et militants qui les ont soutenues une bande dessinée qui nous replonge dans une époque pas si lointaine, la France de Georges Pompidou, où le sort des femmes reste suspendu à des règlements avariés, entre les mains d’une justice tenue par des hommes.
Parce que de nombreux combats féministes restent à mener en France et dans le monde et que les avancées sont toujours fragiles, voire balayées d’un trait de plume, les autrices ont placé en exergue du livre une citation de Simone de Beauvoir : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devez rester vigilantes votre vie durant ».
Bobigny 1972, Marie Bardiaux-Vaïente et Carole Maurel (éd. Glénat) 25,00€