Le nouveau livre de Salman Rushdie témoigne d’un brusque retour en arrière temporel, rappelant au monde les appels à faire mourir l’auteur des Versets sataniques, magnifique roman sur le monde du cinéma indien, tenant du « réalisme magique » et dont la structure complexe exige une lecture attentive. La tentative d’assassinat du 12 août 2022 sur Salman Rushdie aura été la cinglante réplique de la fatwa lancée par l’ayatollah Khomeini en 1989, réplique de 27 secondes pendant laquelle l’assassin raté, que l’auteur nomme avec mépris «  le A. », va frapper de nombreux coups de couteau avec un acharnement fou.

Le titre anglais du livre, « Knife », rend avec beaucoup de réalisme la dimension « tranchante » de l’acte, mais aussi du fait que la vie de l’auteur aura été elle aussi tranchée en un avant et un après. Le livre est le récit de l’« après », récit de la reconstruction physique et morale de Salman Rushdie.
Reprenant les premières lignes des Versets sataniques - « pour renaître, chantait Gibreel Farishta en tombant des cieux, il faut d’abord mourir », notre conteur va dépeindre d’abord son émerveillement à se trouver toujours en vie, puis sa rémission, soutenue par l’amour de sa femme et de ses proches. 

Devenu bien malgré lui une incarnation de la liberté d’expression pour le monde entier, liberté d’expression que certains imbéciles aimeraient supprimer à coups de couteau, Salman Rushdie offre avec ce livre une puissante leçon de courage et d’optimisme.
Malgré la barbarie dont Le Couteau témoigne et dont il a été victime, l’auteur ne se départit jamais de l’humour qu’on lui connaît dans ses romans, un humour en l’occurrence ravageur.

Le Couteau Salman Rushdie (éd. Gallimard) 23,00€