Selon les calculs d’Oxfam France, la rémunération du travail dans la valeur ajoutée est passée de 61 % à 51 %, soit une baisse de 10 points en dix ans. Ainsi, les dividendes du CAC40 ont connu un nouveau record en 2022 avec 80,1 milliards d’euros versés à leurs actionnaires. En parallèle, jamais les entreprises françaises n’ont touché autant d’aides publiques, un paradoxe difficile à appréhender, tant les interventions économiques en faveur des entreprises sont diverses.

Une étude de France Stratégie de décembre 2020 recense 19 ensembles de catégories, des aides directement ciblées aux aides indirectes, dont les objectifs plus flous sont d’avoir un impact positif sur l’économie et la fameuse compétitivité. Leurs calculs faits sur deux périmètres, un large et un autre restreint, montrent des volumes d’intervention respectivement de 223 mds € et de 139 mds € en 2019. Une étude de chercheurs lillois mandatée par l’Ires et la CGT de mai 2022 chiffre ces aides à 157 mds € et pointe surtout la multiplication des dispositifs d’État ou régionaux ainsi que le volume croissant qu’elles représentent. Dans les années 90, elles oscillaient autour de 30 mds € (courants) mais depuis 2001 leur croissance ne s’arrête plus, 100 mds € en 2008 pour atteindre sans doute un nouveau record cette année. L’étude précise que « ces politiques peuvent en effet entraîner des effets d’accoutumance et de dépendance, (…) leur mise en place n’atteint pas les objectifs fixés (en termes d’emplois notamment), mais que leur suppression entraîne des effets néfastes (…) ce qui légitime, aux yeux de leurs partisans, d’« augmenter la dose » à intervalle de temps régulier. »

À l’heure où le gouvernement prépare sa cure d’austérité, ces chiffres remettent en perspective les différentes sources de financement du budget de l’État et interrogent sur l’efficacité notamment des mesures de baisse de prélèvements obligatoires des entreprises selon qu’elles soient accompagnées ou non de contreparties. Si les 20 mds € du CICE interrogent depuis sa création, les 22 mds € d’allègement de charges sur les bas salaires sont tout autant pervers pour une juste rémunération des travailleurs.