Barbara Stiegler (née en 1971) fille ainée de Bernard Stiegler, enseigne la philosophie à l’université Bordeaux-Montaigne. Dans ce petit livre de 135 pages (7 euros), publié en août 2020, elle fait le bilan de ses réflexions sur ses expériences de luttes entre novembre 2018 et mars 2020.

Impossible d’aller plus loin, sans présenter d’abord, le parcours singulier de son père. 
Bernard Stiegler, né en 1952 d’un père électronicien et d’une mère employée de banque, arrête sa scolarité après la classe de seconde. A 22 ans ayant de grandes difficultés financières, il part avec sa famille, sa première épouse et leur fille Barbara, à la campagne élever des chèvres.
La sécheresse de 1976 est une catastrophe qui l’oblige à vendre. A Toulouse, il rachète un bar où il invite des musiciens de jazz. Son banquier supprime son découvert, Stiegler passe aux attaques à main armée. La dernière en juin 1978 se conclut par son arrestation.

Barbara à 7 ans.
Condamné à 8 ans de prison, il sera libéré au bout de 5 ans (1978-1983).
Il met à profit ces années pour étudier. Il reçoit le soutien de Jacques Dérida.
Devenu philosophe, il axe sa réflexion sur les enjeux des mutations actuelles sociales, politiques, économiques et psychologiques portées par le développement technologique et notamment les technologies numériques...(Réenchanter le monde : la valeur esprit contre le populisme industriel, 2006).
Le 5 août 2020, à l’âge de 68 ans il met fin à ses jours. Des problèmes des santé, s’ajoutent à sa dépression. Barbara publie son dernier livre.

Ce détour indispensable,  permet de retrouver Barbara pour éclairer toutes ses dernières évolutions.
Pas facile d’être la fille ainée... Elle réussit l’agrégation en 1994, fait du monitorat entre 1995 et 1998, travaille comme professeure de philo dans le secondaire. Devenue maître de conférence en 2006, elle commence ses recherches : « Qu’y a-t-il de nouveau dans le néo-libéralisme ? » en 2011

A la suite des élections européennes de mai 2019, elle est frappée par le fait que le mouvement inédit des gilets jaunes ne s’exprime pas dans les urnes. Sa réflexion se poursuit sur l’analyse critique de la notion de « néolibéralisme ».

Face à un Etat devenu l’instrument « d’un nouveau » libéralisme qui détruit la société, elle en appelle au soulèvement pour « reprendre vie », contre ce cap érigé en dogme par la pensée politique dominante, selon laquelle il faudrait continuellement « s’adapter » pour satisfaire au jeu des échanges marchands et de la compétition mondiale.

Il lui paraît donc essentiel de repartir des luttes collectives et des initiatives démocratiques locales, pour retrouver « une puissance d’agir et de réenchanter la démocratie ».