Alors que nous traversons la plus grave crise sanitaire de l’histoire moderne, il nous appartient collectivement de veiller à ne pas porter une atteinte irréversible à nos libertés fondamentales et individuelles.

Nous reproduisons ci-dessous l’intervention d’Eliane Assassi, présidente du groupe CRCE au Sénat :

« Le parcours de cette application a été chaotique. Un premier débat avait été annoncé pour fin avril puis repoussé par le Premier ministre au motif que l’application n’était pas prête. L’est-elle aujourd’hui ? Vous avez annoncé son déploiement pour ce week-end, en attendant le feu vert du Parlement : mais quelle valeur accordez-vous au vote du Sénat ? Le même qu’à son vote sur le plan du déconfinement ? Vous êtes catégoriques sur les précautions prises pour respecter les libertés publiques mais de nombreuses questions éthiques, politiques et techniques demeurent. Le Bluetooth évite certes la géolocalisation mais c’est une véritable passoire ouverte au piratage. En évoquant l’avis de la CNIL, vous omettez de mentionner qu’en l’état du projet de décret, les droits d’accès d’effacement ou d’opposition ne s’appliquent pas. Selon la représentante de l’Inria entendue ce matin par la commission de la culture, en temps normal, une telle application est développée en cinq ans, pas en trois mois : quelles que soient les ressources mobilisées, il y aura des failles. L’innocuité d’un système ne doit pas être présumée en comptant sur l’honnêteté des acteurs !

L’usage de l’application est volontaire, dites-vous, mais son non-usage ne risque-t-il pas d’être reproché, par un employeur par exemple ? L’implication de grands groupes dans le développement de cette application ne nous rassure guère. Dans une tribune du Monde, trois spécialistes du numérique disent craindre un dévoiement possible de l’application comme un outil coercitif. Les médecins et les épidémiologistes seraient tous favorables à cette application ? J’en connais qui ne le sont pas. Mais le Parlement est le seul juge de la défense des libertés publiques. Vous auriez mieux fait d’écouter les sachants sur les moyens de l’hôpital ! StopCovid ouvre la voie à des dispositions intrusives dans d’autres domaines et pour d’autres finalités. Nous sommes résolument opposés à cet engrenage qui risque de mener à une surveillance généralisée. »