Le 16 mai dernier, les forces de l’ordre empêchaient la tenue d’une manifestation de gilets jaunes place du Commando à Saint-Nazaire. Si le mode d’action – alors que le virus continue de circuler – peut laisser sceptique, la volonté d’exprimer des revendications sociales dès le premier week-end du déconfinement est remarquable. 
La crise épidémique que nous traversons a mis en lumière le rôle primordial des services publics dans le maintien des activités essentielles du pays malgré 30 ans de laminage néolibéral. La classe ouvrière avec les travailleurs de la terre, si souvent oubliée des discours au XXIe siècle a rappelé son caractère indispensable dans toute économie.

Pourtant ceux-là même qui se montrent essentiels en période de crise enchaînent depuis plusieurs décennies une série de reculs sociaux marqués par une austérité salariale de longue durée. 
L’économiste Patrick Artus a récemment décrit ce phénomène comme constitutif du capitalisme financier, associé à des taux d’intérêts bas, pour maximiser les marges d’entreprises au détriment des États, surendettés.
En Europe, c’est justement la solution qui a été choisie : afin de soutenir les salariés précarisés par le chômage partiel, les pouvoirs publics ont préféré avoir recours à l’endettement – donc de mobiliser le capital financier – plutôt que d’aller chercher l’argent là où il se trouve, c’est-à-dire de taxer le capital. 
Ainsi Emmanuel Macron et Angela Merkel peuvent présenter comme une victoire l’annonce d’un plan de relance européen à hauteur de 500 milliards d’euro soit… le quart de ce que demandait le parlement européen.

Forcément, quand les travailleurs doivent coupler bas salaires et hausses fiscales pour contenter le capital par les deux bouts, certaines idées passent mal. L’institut Montaigne, cercle de réflexion libéral, propose ainsi d’augmenter significativement le temps de travail afin de « relancer l’économie ». L’épidémie de Covid-19 ne doit pas faire oublier le contexte social dans lequel se trouve notre pays. De 2018 à 2019, pendant un an, le mouvement des gilets jaunes a fait entrer de manière éclatante la question du pouvoir d’achat dans le quinquennat d’Emmanuel Macron. À l’hiver dernier, plus d’un million de Français manifestaient dans la rue leur attachement à un système de retraite solidaire, fruit des combats de la Résistance. Il est clair que pour une majorité de nos concitoyens le poids du capital dans leurs vies atteint un niveau insupportable.
Toutes les leçons de la crise sanitaire ne sont pas encore tirées : la crise du capitalisme a, elle, été révélé aux yeux de tous, la colère qui monte dans le pays en est la preuve la plus éclatante.

Emplois : les salariés encore en première ligne

Les salariés d’Uber aux États-Unis ont pu goûter à la réponse locale aux fluctuations de l’activité : 3500 d’entre eux ont appris leur licenciement du jour au lendemain par visioconférence.  Une certaine idée de la protection de l’emploi.
Plus proche de nous, la SNCF dont les pertes sur l’ensemble du confinement avoisineront les 3 milliards d’euro réfléchit à « resserrer ses coûts de fonctionnement » selon son président Jean-Pierre Farandou. Si aucune annonce en termes d’effectifs n’a encore été faite, la récente fin de l’embauche sous statut des cheminots à de quoi inquiéter.