Avec la promesse d’un soutien à la fois financier et marketing, le label « Les plus belles fêtes de France » a su séduire plus d’une association organisatrice de festivités traditionnelles. Macaron à afficher sur ses communications, panneau officiel à implanter à l’entrée de la commune, diffusion par les réseaux sociaux à l’échelle nationale, réduction des droits Sacem et surtout soutien financier à hauteur de plusieurs milliers d’euros sont les promesses du label. Une aubaine pour certaines fêtes locales qui peinent à joindre les deux bouts d’année en année… Le hic, c’est le lien extrêmement étroit existant entre le label et le milliardaire Pierre-Edouard Stérin.
Après les révélations du journal L’Humanité sur l’homme d’affaires d’extrême droite ultra conservateur et le projet Périclès visant à l’union des droites pour faire accéder au pouvoir l’idéologie du Rassemblement National, les liens entre le label et le milliardaire font tâche. L’association « Les plus belles fêtes de France » a été fondée par Thibaut Farrenq, cofondateur avec Stérin de « La nuit du Bien commun ». Ses dirigeants Odile Téqui et Thomas Meslin Sainte Beuve ont également travaillé pour le « Fonds du Bien commun ». Même la domiciliation de l’association du label, jusqu’au printemps 2025, était similaire à celle du Fonds et des filiales d’Otium, holding détenue par Stérin lui-même. L’association des Plus belles fêtes de France emploie par ailleurs le Studio 496 ( faisant référence à l’année du baptême de Clovis) en partie propriété du milliardaire. Bien que le discours de l’association « s’engage pour que les traditions locales se perpétuent et pour que nos territoires demeurent des lieux vivants facteurs de lien social », le choix des premières festivités récompensées n’est pas laissé au hasard ou sur de simples critères de terroir.
Ainsi la Fête du Piment d’Espelette a fait parti de la dizaine d’événements traditionnels démarchés initialement, avec une adhésion gratuite et un soutien financier en plus de la promesse d’apparaître dans le prochain « Guide Michelin des fêtes ». Depuis, plusieurs dizaines de fêtes locales ont adhéré au label après avoir candidaté sur dossier et réglé des frais d’inscription pour certaines. La remise du label en grandes pompes au Sénat et parrainage de Stéphane Bern font aussi partie du folklore. Après l’écho médiatique autour du milliardaire d’extrême droite, l’association organisatrice de la Fête du Piment d’Espelette a décidé de se retirer du label, préférant faire un trait sur un soutien financier plutôt que de servir à une instrumentalisation politique.
C’est également le cas d’autres festivités à travers le Pays Basque, la Gironde, la Bretagne et la Normandie, ou encore la Foire aux champignons de Haute-Loire. Ce rendez-vous qui accueille 50 000 participants ne prendra pas le financement de 5000 euros prévu et s’est retiré du label. L’organisateur a demandé par courrier à ce que les statuts, les financements et les mécènes de l’association délivrant le label lui soient communiqués mais là encore l’opacité règne et l’absence de retour l’a conforté dans son retrait des « plus belles fêtes de France ».
D’autres fêtes traditionnelles bottent en touche, préférant n’y voir qu’un lien financier comme il y en a dans le tissu associatif. Une manière de ne pas réellement assumer leur adhésion à certaines valeurs conservatrices et identitaires… Le démarchage des associations culturelles organisatrices de fêtes traditionnelles se fait par l’intermédiaire de Néo Média, une agence de communication qui n’hésite pas à mettre en avant la mise en « danger » du patrimoine, avec des références aux gaulois ou encore à la chrétienté. Du côté de la Loire-Atlantique, la mairie a déjà fait part de sa demande de retrait de l’agenda pour le Carnaval de Nantes. Pour les fêtes médiévales de Guérande qui ont lieu en juin, la communication du retrait reste timide et l’adhésion au label toujours effective, reste à voir la position qui restera dans le temps…
